Les députés ont voté fin juin l'interdiction de vendre des cigarettes électroniques aux mineurs. La prochaine étape pourrait bien voir l'interdiction de « vapoter » dans les lieux publics ou encore la vente exclusive en pharmacie.
La cigarette électronique est dans le collimateur du ministère de la santé. Et les vapoteurs n'ont qu'à bien se tenir car en effet, même si les nuages de buées aromatisées sont pour l'instant tolérés dans les lieux publics, leurs jours pourraient être comptés ! Un nouveau coup dur pour les réseaux spécialisés qui se sont lancés très récemment sur le créneau du sevrage tabagique après le vote de l'interdiction de vendre aux mineurs des e-cigarettes et la prochaine interdiction de publicité.
Un flou juridique
La cigarette électronique est à l'heure actuelle victime de son statut hybride, à mi-chemin entre le produit récréatif et le produit médicamenteux. Ainsi, d'un côté, elle est présentée comme un produit « fun » de grande consommation et connait à ce titre d'ailleurs un vrai succès (plus d'un million de vapoteurs seraient recensés en France). Ce côté fun est largement amené par la multiplication des parfums ces derniers mois, déclinés avec ou sans nicotine, pour répondre à tous les goûts. L'objet devient de ce fait à la mode, même chez ceux qui ne fument pas en temps normal... Mais la cigarette électronique est aussi volontiers mise en avant pour son efficacité à réduire, voire arrêter, la consommation de tabac. Or en l'absence de recul, et d'études ad-hoc, elle ne bénéficie pas du statut de médicament réservé aux produits classiques de sevrage tabagique (gommes à mâcher, patch...). C'est sur ce flou juridique que plusieurs réseaux en franchise ont parié pour se lancer dans la commercialisation de l'e-cigarette. Une stratégie qui particulièrement payante si l'on en croit les courbes de croissance de ces réseaux. Mais l'épée de Damoclès demeure car en effet, plusieurs rapports insistent sur le fait que l'e-cigarette est trop souvent un tremplin vers la vraie cigarette pour les jeunes. Elle recèle donc à ce titre d'un potentiel danger pour la santé... Voilà pourquoi, l'Etat se devant de réagir vite, les députés ont voté fin juin dans le cadre du projet de loi sur la consommation, un amendement spécifique interdisant la vente aux mineurs dans les débits de tabac, commerces ou lieux publics les « cigarettes électroniques ou toutes autres formes d'inhalateurs électro-mécaniques ou électroniques simulant l'acte de fumer ». Un premier coup dur pour les réseaux spécialisés en franchise, qui devrait être encore amplifié dans les prochaines semaines par une interdiction de communication autour de l'e-cigarette, à l'identique de la vraie cigarette.
Bataille en vue dans les prochaines semaines
Le tabac et ses substituts (agréés ou non) sont loin d'être des produits « comme les autres ». Pourquoi ? Essentiellement pour des questions de santé publique mais aussi pour des questions de « gros sous » ! En clair, plus encore que l'Etat, le lobby des cigarettiers et le lobby des laboratoires pharmaceutiques fabricant de produits de sevrage tabagiques veillent au grain ! Face au recul des ventes de vraies cigarettes, les grandes majors du tabac organisent d'ores et déjà la riposte. Et cette riposte est curieuse en ce sens qu'elle ne vise pas à interdire la vente de e-cigarettes mais plutôt à la placer sous contrôle. En effet, les cigarettiers ont récemment saisi la communauté européenne pour que l'e-cigarette soit classée comme médicament de sevrage tabagique. Une stratégie détournée qui si elle aboutit, pourrait voir l'e-cigarette uniquement vendue sur prescription médicale. Le recul des ventes des gommes à mâcher et autres patchs devrait également amorcer une riposte de l'industrie pharmaceutique. On voit tout de suite que le produit serait soudainement beaucoup moins « fun »... Cette contre-attaque curieuse s'accompagne tout aussi curieusement d'un mouvement massif des cigarettiers vers la vente de e-cigarettes... De son côté l'Etat, par l'intermédiaire de la ministre de la Santé, Marisol Touraine, a fait savoir que les conditions pourraient bien se durcir dans les prochaines semaines sur l'utilisation de l'e-cigarette. En effet, la ministre de la santé n'a pas caché qu'elle souhaite faire interdire le vapotage dans les lieux publics, à l'identique de la vraie cigarette. Cette interdiction qui propulse l'e-cigarette sur le même pied d'égalité que la vraie cigarette pourrait inciter à croire que l'Etat serait plus enclin à laisser faire la vente hors pharmacie. L'idée d'une taxe supplémentaire a même été évoquée... Comme on le voit, l'avenir de la cigarette électronique est pour l'instant incertain. Médicament ou pas ? Vente libre ou vente seulement chez les débitants de tabac ou les pharmacies ? Le débat n'est pas encore tranché.
Dominique André-Chaigneau, Franchise Magasin ©